Lors de la réunion du Conseil de Bank Al-Maghrib, tenu le mardi 27 septembre de sa troisième session de l’année 2022 il a été décidé de relever le taux directeur de 50 points de base à 2% tout en continuant à suivre de près la conjoncture économique nationale et internationale, et en particulier l’évolution des pressions inflationnistes
Cette décision vise à «prévenir tout désancrage des anticipations d’inflation et assurer les conditions d’un retour rapide à des niveaux en ligne avec l’objectif de stabilité des prix », précise le communiqué de presse. réunion, il a analysé les développements de la conjoncture internationale et relevé qu’elle reste marquée profondément par les séquelles de la pandémie et les implications de la guerre en Ukraine, à travers notamment la persistance du renchérissement des produits énergétiques et alimentaires, ainsi que des perturbations des chaines d’approvisionnement. Ces évolutions poussent l’inflation vers des niveaux exceptionnellement élevés, ce qui amène les banques centrales à renforcer le resserrement rapide et largement synchronisé de leurs politiques monétaires, induisant un ralentissement sensible de l’économie mondiale après le rebond qu’elle a connu en 2021.
Selon la même source les données relatives aux huit premiers mois de l’année indiquent que l’inflation a poursuivi son accélération pour atteindre 8% en août après 7,7% en juillet, 6,3% en moyenne au deuxième trimestre et 4% au premier. Elle est tirée essentiellement par le renchérissement des produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. De surcroit, les données disponibles dénotent une diffusion de plus en plus large de la hausse des prix. En effet, sur les 116 sections de biens et services qui composent le panier de référence de l’indice des prix à la consommation, 60,3% ont connu une augmentation de plus de 2% en août contre 42,2% en janvier. Tenant compte de ces évolutions, les projections de Bank Al-Maghrib tablent désormais sur une accélération de l’inflation à 6,3% sur l’ensemble de l’année, contre 1,4% en 2021, avant de revenir à 2,4% en 2023. Portée par la hausse des prix des produits alimentaires qui y sont inclus, sa composante sous-jacente passerait de 1,7% à 6,3% en 2022 puis décélérerait à 2,5% en 2023.
Au niveau national, la croissance économique marquerait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, un net ralentissement cette année à 0,8%, résultat d’un recul de 14,7% de la valeur ajoutée agricole et d’une décélération à 3,4% du rythme des activités non agricoles. En 2023, elle s’accélérerait à 3,6% en lien avec la hausse prévue de 11,9% de la valeur ajoutée agricole, sous l’hypothèse d’un retour à une production céréalière moyenne de 75 millions de quintaux. Les activités non agricoles continueraient en revanche de ralentir, leur rythme devant revenir à 2,5%.
Sur le plan des comptes extérieurs, explique la BAM, la forte dynamique des échanges devrait se poursuivre cette année avec une hausse des exportations de 34%, tirée essentiellement par les ventes du phosphate et dérivés qui atteindraient 144,5 milliards de dirhams et celles du secteur automobile qui se situeraient à près de 100 milliards.
En effet, en 2023, un recul des exportations de 1,1% serait enregistré, avec la baisse relative des cours du phosphate et dérivés. En parallèle, les importations ressortiraient en progression de 34,5% en 2022, sous l’effet de l’alourdissement de la facture énergétique à 135,1 3 milliards de dirhams et de l’accroissement des achats des demi-produits à 167 milliards. En 2023, elles diminueraient de 4,6%, en lien principalement avec les replis prévus des cours des produits pétroliers et des approvisionnements en blé.
Les recettes voyages connaitraient une nette amélioration à 79,8 milliards de dirhams en 2022 et se stabiliseraient à ce niveau en 2023 car le secteur a bien bénéficié de la réouverture des frontières et de la régression notable de la pandémie au niveau mondial.
Les transferts des MRE devraient continuer de progresser pour totaliser près de 100 milliards de dirhams sur l’ensemble de l’année avant de revenir à 92,4 milliards en 2023. Dans ces conditions, le déficit du compte courant se situerait à l’équivalent de 3,2% du PIB en 2022 avant de s’alléger à 1,9% en 2023. Concernant les IDE, les recettes avoisineraient l’équivalent de 3,2% du PIB annuellement sur les deux prochaines années. Au total, et sous l’hypothèse notamment de la concrétisation des financements extérieurs prévisionnels du Trésor, les avoirs officiels de réserves s’établiraient à 343,7 milliards de dirhams à fin 2022 et à 360,7 milliards à fin 2023, assurant ainsi une couverture autour de 6 mois d’importations de biens et services.
Pour ce qui est des conditions monétaires, la forte appréciation du dollar vis-à-vis de l’euro, induite notamment par la divergence des rythmes de resserrement des politiques monétaires de la FED et de la BCE, se reflète sur le taux de change effectif nominal du dirham. Après une hausse de 2,1% en 2021, ce dernier devrait enregistrer une légère baisse sur l’ensemble de l’année avant de s’apprécier de 1,7% en 2023. Tenant compte des niveaux d’inflation domestique inférieurs à ceux des pays partenaires et concurrents, ce taux ressortirait en dépréciation en termes réels de 1,8% en 2022 avant de s’apprécier de 0,4% en 2023. Sur le même registre, les évaluations trimestrielles réalisées par Bank Al-Maghrib continuent de montrer l’absence de signes de désalignement du dirham par rapport aux fondamentaux de l’économie nationale. Quant aux taux débiteurs, ils ont connu une quasi-stabilité au deuxième trimestre de 2022 recouvrant notamment un recul de 18 points de base pour les crédits à la consommation ainsi que des hausses de 29 pb pour ceux à l’équipement et de 30 pb pour les prêts immobiliers destinés aux entreprises. S’agissant du besoin de liquidité des banques, il se creuserait à 85,1 milliards de dirhams à fin 2022 et à 89,6 milliards à fin 2023. Concernant le crédit bancaire au secteur non financier, il devrait augmenter de 4% en 2022 et de 3,6% en 2023.
Au niveau des finances publiques, ajoute le communiqué, l’exécution budgétaire au titre des huit premiers mois de l’année fait ressortir une amélioration de 24,5% des recettes ordinaires portée principalement par l’augmentation des rentrées fiscales. En parallèle, les dépenses globales se sont alourdies de 13,1% reflétant en particulier la hausse de la charge de compensation. Tenant compte notamment de la progression attendue des recettes fiscales, de la mobilisation des ressources au titre des financements spécifiques ainsi que de l’évolution prévue de la charge de compensation, le déficit budgétaire devrait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, passer de 5,9% du PIB en 2021 à 5,5% en 2022 avant de s’atténuer à 5,0% en 2023.