Alors que la crise sanitaire continue de hanter les esprits avec la naissance de nouveaux variants, les tensions géostratégiques nées du conflit en Ukraine viennent asséner un nouveau coup dur à l’économie mondiale désormais à l’épreuve d’une croissance en berne et une inflation galopante qui creusent davantage les inégalités et pénalisent particulièrement les pays vulnérables.
« Nous sommes confrontés à une crise qui vient s’ajouter à une autre crise », a déclaré la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, dans un discours à la veille des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale qui s’ouvrent lundi à Washington avec l’annonce attendue de prévisions de croissance à la baisse pour 2022, voire 2023.
La guerre et ses répercussions vont contraindre le FMI à revoir à la baisse les prévisions pour 143 pays, représentant 86 % du PIB mondial.
« Les perspectives sont extraordinairement incertaines, bien au-delà de la normale », a prévenu la DG du FMI.
Car au delà des souffrances et de la crise humanitaire, le conflit entre la Russie et l’Ukraine, deux importants producteurs de matières premières, ébranle l’économie mondiale, aggrave la pauvreté et la faim et alourdit le fardeau de la dette à un moment où beaucoup de pays se remettent à peine de plus de deux années de pandémie.
Partout, le rythme de croissance s’est ralenti et les prix des denrées alimentaires et de l’énergie ont atteint des niveaux records.
« Jamais autant de pays n’ont connu une récession en même temps, subissant une perte de capitaux, d’emplois et de moyens de subsistance », assène, pour sa part, le patron de la Banque mondiale, David Malpass.
Evoquant la flambée des prix alimentaires aux effets dévastateurs sur les plus démunis, il a indiqué que pour chaque point de pourcentage d’augmentation des prix alimentaires, 10 millions de personnes devraient basculer dans l’extrême pauvreté.
Selon le FMI, la forte hausse des prix des denrées alimentaires et des carburants « pourrait accroître le risque de troubles dans certaines régions, telles que l’Afrique subsaharienne, l’Amérique latine, le Caucase et l’Asie centrale, tandis que l’insécurité alimentaire devrait encore empirer dans certaines parties de l’Afrique et du Moyen-Orient ».
En Afrique subsaharienne par exemple, les prix record du blé sont particulièrement préoccupants. Les importations représentent environ 85 % de l’approvisionnement de la région, dont un tiers provient de Russie ou d’Ukraine.
Depuis le déclenchement des hostilités en Ukraine, le 24 février dernier, des perturbations majeures ont été ressenties sur les échanges commerciaux, les chaînes d’approvisionnement, le flux touristique et les transferts de fonds.
Le conflit a également engendré une perte de confiance des entreprises et une incertitude accrue des investisseurs avec pour conséquence un resserrement des conditions financières et une éventuelle sortie de capitaux des marchés émergents.
« Sur cette double crise, associant pandémie et guerre, et sur notre capacité à y faire face ou non, vient encore se greffer un autre risque de plus en plus présent : la fragmentation de l’économie mondiale en blocs géopolitiques, caractérisés par des normes commerciales et technologiques, des monnaies de réserve et des systèmes de paiement différents », prévient la DG du FMI qui évoque un « moment crucial » pour la communauté internationale.
Pour les deux institutions de Bretton Woods, l’urgence est de mettre fin à la guerre en Ukraine, faire face à la pandémie et s’attaquer à l’inflation et à la dette. Un pari qui s’annonce des plus complexe à un moment où le monde est particulièrement fragmenté.
Ces dossiers seront indéniablement dominants lors des assemblées du FMI et de la Banque mondiale qui réunissent du 18 au 24 avril dans la capitale fédérale américaine les ministres des finances et du développement, les directeurs des banques centrales, les dirigeants du secteur privé ainsi que des représentants d’organisations de la société civile, et des experts issus des